Entretien avec le nouveau Champion du monde de voltige aérienne

09/09/2022

Après avoir remporté les W.A.C en Pologne en août dernier, le Capitaine Florent Oddon, pilote de l'Équipe de voltige de l'armée de l'Air et de l'Espace, revient sur son expérience.

Mon Capitaine, quelle a été votre première pensée lorsque l'on vous a annoncé les résultats et que vous avez compris que vous étiez champion du monde ?

"En réalité, j'ai pris la compétition étape par étape, programme par programme. Lorsque mon camarade Luxembourgeois Alex Hory m'annonce que les résultats sont sortis et que je suis Champion du monde, je pense initialement qu'il parle du dernier programme, dont nous attendions les notes. Il m'a fallu quelques secondes de plus pour comprendre ce qui était en train d'arriver. Et quelques minutes après, j'ai pensé à tous mes proches sans qui je ne serais arrivé à ce résultat, et j'ai passé de bons moments au téléphone pour leur annoncer la nouvelle."

Avez-vous toujours su que vous vouliez être pilote ? Et faire partie de l'EVAA ?

"Plus ou moins, oui. Ayant baigné dans le milieu de l'aviation et étant passionné depuis mon plus jeune âge, je ne me voyais pas faire un métier qui n'ait pas de rapport avec l'aéronautique. L'EVAA c'est venu plus tard. J'ai pu goûter à la voltige aérienne lorsque j'étais ado, et j'ai compris que la discipline serait la continuité de mon parcours. En voyant évoluer avant mon entrée dans l'AAE Jean-Michel Delorme en meeting, ancien pilote de l'équipe, je me suis dit que tôt ou tard, il faudrait tenter de rentrer dans cette unité."

Comment envisagez-vous l'avenir ? Quel est votre prochain objectif ?

"Il me reste une petite dizaine d'années de potentiel dans l'AAE. Pour le moment, je suis parfaitement épanoui à l'EVAA. Sur le plan sportif, j'arriverai à garder la motivation et continuerai mon investissement dans la voltige de compétition, le travail de ces 5 années d'entraînement commençant seulement à porter ses fruits. Sur le plan fonctionnement de l'équipe, nous avons pas mal de défis à relever ces prochaines années. D'ici 3 ans, tous les pilotes actuellement en poste seront partis, sauf moi, étant le plus jeune. Il s'agira donc d'en recruter de nouveaux, et de leur donner tout le socle technique transmis de pilotes en pilotes depuis plus de 50ans."

Quel est votre secret pour maintenir une concentration optimale ? 

"La voltige est un sport très générateur de stress. Nous avons tous été dans le milieu opérationnel avant d'intégrer l'EVAA, et même si ça peut paraître difficile à croire, jamais nous n'avons été autant stressés qu'au moment de débuter un programme de voltige devant un collège de juges. Nous y avons tous été confrontés, il n'est pas rare de voir un pilote perdre une bonne partie de ses moyens en entrant dans le box lorsque les vols sont notés. Je dirai qu'il s'agit plus d'une question de gestion du stress que de concentration.

Nous avons pu à l'EVAA travailler avec Jean-Charles Arliaud, préparateur mental, plus particulièrement spécialisé dans l'hypnose. C'est quelqu'un qui nous suit depuis 2019, et pour ma part en tout cas, j'ai pu observer des résultats assez incroyables. Il faut croire en la méthode, mais sans cet outil, je ne serais certainement pas arrivé au même résultat. Sur un championnat du monde, beaucoup de pilotes sont techniquement aptes à gagner. Ce qui fait la différence à la fin, c'est justement d'arriver à ne pas perdre ses moyens, et dans la longueur, il faut tenir la distance sur les 10 jours de compétition."

La voltige est un sport très exigeant, quelle est votre routine pour vous maintenir en forme ? 

"J'ai la chance d'avoir le gabarit idéal du voltigeur : grand (mais pas trop ;) ) trapu, la morphologie parfaite pour encaisser les facteurs de charge (+/- 10G). J'ai aussi pu intégrer l'EVAA assez jeune, ce qui fait qu'encore aujourd'hui, je n'ai pas besoin de beaucoup de préparation physique pour être bien dans l'avion; je consacre mon énergie entièrement à mes vols. Mais tout ça ne pourra qu'évoluer dans le mauvais sens en vieillissant.

Nous avons aussi durant les stages équipe de France organisés par la Fédération Française Aéronautique, la possibilité d'être suivi par une kiné, Marion Jost, qui nous aide clairement à mieux vivre physiquement les semaines d'entraînement, nous sentons totalement la différence en matière de récupération lorsque nous organisons des stages internes EVAA où nous n'avons pas de kiné. Sinon de façon générale, au-delà d'une alimentation saine et d'un sommeil de qualité, il ne faut pas négliger les périodes de repos, sans vol. Nous enchaînons régulièrement jusqu'à la fin des échéances sportives meetings aériens et stages d'entraînement, et c'est souvent en rentrant chez nous que nous nous rendons compte de la fatigue physique accumulée."

Le Capitaine Oddon, de retour de Pologne

Le nouveau champion du monde de voltige aérienne